Il n’a pas fallu attendre longtemps pour que l’annonce de la création du parti de l’ancien Premier ministre suscite des tensions à la présidence congolaise.
Le week-end dernier a, notamment, été marqué en République démocratique du Congo par l’annonce de la création d’un nouveau parti politique. Nom de cette nouvelle formation : Leadership et Gouvernance pour le Développement (LGD). L’annonce d’un parti de plus dans un paysage politique congolais déjà largement fragmenté n’a a priori pas de quoi mobiliser l’attention de la présidence de la République.
Or, celle-ci n’a pas tardé à réagir en tentant de museler l’homme qui est derrière ces trois lettres : Augustin Matata Ponyo. L’ancien ministre des Finances et ancien Premier ministre, de mai 2012 à décembre 2016, est scruté depuis de longs mois. Beaucoup lui prêtent des ambitions présidentielles. Dans les rangs de la Kabilie, certains l’avaient déjà annoncé comme dauphin évident à la succession à Joseph Kabila avant que le choix du raïs ne se porte sur Emmanuel Shadary.
Cette fois, un an après son retour à Kinshasa, et à un peu plus de 18 mois de la présidentielle (si celle-ci a lieu dans les délais constitutionnels !), Augustin Matata Ponyo semble se lancer dans la bagarre en créant son parti Leadership et Gouvernance pour le Développement (LGD).
Une annonce qui n’est pas passée inaperçue dans la majorité présidentielle. Depuis des mois, celle-ci a multiplié les tentatives pour mettre l’homme du Maniema hors course en l’impliquant dans divers dossiers politico-judiciaires.
Devenu sénateur, l’homme à l’éternelle cravate rouge, est protégée par une immunité parlementaire que les membres de l’Union sacrée n’ont pas réussi à faire lever en séance plénière. Il avait donc fallu attendre que les sénateurs soient en congé pour que le bureau de la haute assemblée puisse obtenir, en petit comité, la levée de cette immunité et renvoie l’ancien Premier ministre devant la Cour Constitutionnelle.
Mais les membres de l’Union sacrée n’étaient pas au bout de leurs peines. En effet, quelques mois plus tard, cette cour se déclarait incompétente pour juger l’ex-Premier ministre.
Le 2 février 2022, le procureur général près la Cour de Cassation écrivait même au président de la République (voir document ci-dessous) pour lui indiquer que « toutes les infractions commises par le Premier ministre pendant ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, ne peuvent être jugées que par la Cour Constitutionnelle (Art. 163 et 164 de la Constitution).
Ainsi, s’étant déclarée incompétente à connaître des poursuites engagées contre les prévenus Matata Ponyo et Cie, aucune autre juridiction ne peut engager d’action pour ces mêmes fats contre l’ancien Premier ministre ».
La présidence congolaise se rangeait alors derrière cet avis juridique.
Trois mois plus tard, le respect des normes et de la séparation du pouvoir semble bien oublié.
Selon différentes sources, dès l’annonce de la création du parti de Matata Ponyo, la présidence a instruit le Procureur général près de la Cour de Cassation de renvoyer le dossier de l’ancien Premier ministre pour qu’il soit fixé rapidement.
Qu’importe l’illégalité de cette démarche, Matata Ponyo paierait ainsi son refus répété de rejoindre les rangs de l’Union sacrée et, pis que tout pour le clan présidentiel, sa détermination à être candidat à la prochaine présidentielle.
Nouveau bras de fer juridique en vue pour l’ancien Premier ministre qui dispose une fois encore de quelques solides atouts dans sa manche.
La libre Afrique