Le groupe État islamique revendique l’attaque de Palma, dans la province de Cabo Delgado, au nord du Mozambique. Une attaque qui aurait fait, selon les autorités de Maputo, des dizaines de morts et provoqué la fuite de milliers de réfugiés depuis mercredi. L’organisation jihadiste à laquelle s’est rallié le groupe islamiste mozambicain Ansar al-Sunna, affirme « contrôler la ville » côtière, à quelques kilomètres du mégaprojet gazier du Français Total, projet qui est de nouveau suspendu depuis samedi.
Selon la communication du groupe État islamique, les jihadistes auraient pris le contrôle de la ville de Palma après trois jours de combats. Ils auraient tué 55 militaires et « chrétiens » ou occidentaux, détruit des bâtiments gouvernementaux et des banques.
De leur côté, les forces mozambicaines estiment à plusieurs dizaines le nombre de tués et disent reprendre du terrain en affrontant des poches de résistance des jihadistes. Des témoins parmi les civils ont raconté à la rédaction lusophone de RFI comment ils avaient fui, par milliers, à pieds vers l’intérieur des terres, ou par mer sur des bateaux de fortune.
Palma, après Mocimboa da Praia
Cette attaque succède à la prise, en août dernier, de Mocimboa da Praia, un port important de la province qui est toujours sous le contrôle des jihadistes, alors que ce port permettait d’approvisionner tout le nord de la région et en particulier le chantier d’extraction et de liquéfaction du gaz mozambicain, mené par Total.
L’étau islamique semble donc se resserrer sur cette région, de la part du groupe islamiste Ansar al-Sunna. Communément appelé Al-Shabab, ce qui veut dire « les jeunes », à ne pas confondre avec les Shebab somaliens, il a été créé en 2007 et ses combats se sont intensifiés, depuis 2017, dans la province de Cabo Delgado.
Le groupe recrute dans le pays voisin, la Tanzanie, et il s’est rallié au groupe État islamique en 2018. Il est ainsi devenu une composante de la branche « État islamique en Afrique centrale » qui vient elle-même d’être inscrite sur la liste des organisations terroristes par les États-Unis et dont une autre composante – les Forces démocratiques alliées, les ADF – mène des opérations en République démocratique du Congo.
L’attaque jihadiste à Palma est intervenue le lendemain de l’annonce, par Total, d’une relance de son projet gazier. Certains experts, joints par RFI estiment que l’attaque-surprise des jihadistes avait été préparée de longue date, après trois mois d’accalmie. Il n’y a donc pas forcément de lien direct avec l’annonce de la relance du projet gazier par Total, mardi dernier, la veille de l’offensive.
Centains employés du site gazier évacués
Mais de fait, le chaos à Palma a poussé Total à renoncer de nouveau à la reprise des travaux sur la péninsule d’Afungi, à quelques kilomètres de là. D’autant que des milliers de civils ont tenté de se réfugier sur le site très protégé de l’opérateur et de ses sous-traitants. Des centaines d’employés ont été rapatriés à Pemba, la principale ville du Cabo Delgado, plus au sud, et qui n’est pas aux mains des jihadistes. Ou encore plus loin à Maputo, la capitale mozambicaine.
Plus généralement, la reprise des attaques jihadistes porte un coup très dur au développement de la région de Cabo Delgado, alors que c’était elle qui attirait le plus d’investissements autour du projet phare de Total, 20 milliards de dollars à lui tout seul.
Une aide militaire de l’UE
Jusqu’à présent, les autorités mozambicaines avaient refusé toute aide des pays voisins de la SADEC pour gérer l’offensive jdihadiste et ses conséquences. Pour l’instant, seuls des mercenaires étrangers – en particulier sud-africains – venaient en renfort au soldats mozambicains.
Mais Maputo vient d’accepter une aide européenne à la formation militaire à laquelle va participer le Portugal, l’ancienne puissance coloniale, qui dirige le Conseil européen depuis le début de l’année, mais aussi la France dont le territoire de Mayotte est à quelques miles marins.
Le gouvernement mozambicain discute aussi en ce moment avec les agences de l’ONU pour organiser les secours aux réfugiés, déjà près de 700 000 personnes déplacées en trois ans.
RFI/bnews