Dans un contexte où les infrastructures de la République Démocratique du Congo se trouvent à la croisée des chemins, le ministre d’État aux Infrastructures, Travaux Publics et Reconstruction (ITPR), Alexis Gisaro, a été interpellé par les députés nationaux sur l’avancement et les défis qui entourent les projets d’infrastructures. Devant l’Assemblée Nationale, il a esquissé un portrait détaillé de la situation actuelle et plaidé pour un appui accru aux initiatives gouvernementales visant à réhabiliter le réseau routier congolais, qualifié de « prioritaire » pour le développement du pays.
Un réseau sous-équipé et en difficulté
Selon Alexis Gisaro, le réseau routier national totalise actuellement 153 000 kilomètres, dont seulement 5% est bitumé, un chiffre qui contraste vivement avec les standards des autres pays de l’Afrique subsaharienne où le taux de revêtement avoisine les 25%. Face à cette réalité, le ministre souligne le besoin urgent d’investissements massifs pour combler le déficit infrastructurel qui entrave la connectivité, non seulement entre les régions, mais également avec les pays voisins.
Pour illustrer l’ampleur des défis, le ministre a détaillé plusieurs projets en cours, notamment la route Kasindi-Beni-Butembo et le tronçon Kisangani-Komanda-Beni. Ces routes, fruit de partenariats avec l’Ouganda, sont financées par un montage de type partenariat public-privé, où chaque pays contribue à hauteur de 20% du coût total, tandis que l’entreprise partenaire, Dott Services Ltd, couvre 60%. La mise en place de péages est également prévue pour assurer le remboursement des investissements, tout en visant à limiter la pression sur les utilisateurs congolais.
Obstacles sécuritaires et défis de logistique
Malgré un lancement salué par la population, les travaux sur ces axes routiers sont freinés par des problèmes de sécurité persistants. « Les contraintes sécuritaires sont un obstacle majeur, particulièrement sur les routes comme Bunagana-Rutshuru-Goma, où les travaux sont au point mort », a expliqué le ministre. Ce contexte sécuritaire complique également le transit de matériaux indispensables aux chantiers, certains équipements ayant même été bloqués en douane en raison d’exonérations non appliquées. Cette situation a conduit des partenaires comme Maison LWANZO à engager des procédures judiciaires pour récupérer des frais d’entreposage impayés.
Le ministre a assuré que des démarches sont en cours pour débloquer ces équipements et garantir la reprise des travaux dans les sections Kasindi-Beni et Beni-Kabasha, tout en espérant un « feu vert sécuritaire » pour avancer sur d’autres axes. Ce projet s’inscrit dans une vision plus large de redynamisation des échanges transfrontaliers et d’amélioration des relations économiques entre la RDC et ses voisins.
Routes prioritaires et plan quinquennal : vers une relance progressive
Pour répondre aux préoccupations des députés, Alexis Gisaro a également évoqué le plan quinquennal 2024-2028, qui ambitionne de moderniser et bitumer plusieurs tronçons clés du réseau national. Parmi les projets prioritaires figurent les axes Bukavu-Nyamukubi et Mbujimayi-Mbanga, financés respectivement par la Banque Africaine de Développement et la Banque mondiale. Ce plan repose sur un apport de divers partenaires techniques et financiers et prévoit l’ajout de près de 12 000 kilomètres de routes bitumées d’intérêt général, dont la RN1 et la RN2, reliant des centres urbains stratégiques.
Ce projet, souligne le ministre, est en partie contraint par les ressources limitées allouées au secteur des infrastructures. Il invite ainsi les députés à plaider pour un budget « en adéquation avec les ambitions de modernisation » lors de la session budgétaire de 2025.
Réhabiliter les zones en conflit : une priorité pour la stabilité nationale
Dans les zones affectées par les conflits armés, notamment dans le Nord-Kivu et l’Ituri, la réhabilitation des routes constitue une priorité pour faciliter la mobilité des forces armées et renforcer la sécurité. Le ministre a révélé des dépenses significatives dans ces zones, atteignant respectivement 3,5 millions USD pour l’Ituri et 2,8 millions USD pour le Nord-Kivu en 2024, malgré des ressources limitées.
Il a également mentionné les nombreux projets de réhabilitation des ponts et de modernisation des axes routiers stratégiques pour assurer un accès continu aux zones en difficulté. Cette initiative, bien que freinée par le manque de financement, est essentielle pour garantir un soutien logistique et sécuritaire efficace dans les régions instables.
Alexis Gisaro a conclu en rappelant aux élus l’importance du soutien budgétaire pour mener à bien ces travaux structurants, insistant sur l’impact économique et social de l’amélioration de la connectivité routière dans le pays.