Ce vendredi 22 novembre, Judith Suminwa, Première ministre de la République démocratique du Congo, est arrivée à Goma dans un contexte marqué par l’urgence sécuritaire et les attentes d’une population épuisée par des années de conflits. Portant sur ses épaules le poids des espoirs d’un peuple désillusionné, elle entame une visite aux multiples enjeux, bien au-delà d’une simple évaluation de l’état de siège instauré il y a trois ans.
L’arrivée de la cheffe du Gouvernement, accompagnée de membres de son cabinet et de parlementaires, a suscité un regain d’attention dans la ville. Le gouverneur militaire de la province avait, dès la veille, invité les habitants à un accueil chaleureux, espérant que cette rencontre avec la délégation sera porteuse d’un message d’espoir. Mais derrière les sourires et les poignées de main, l’impatience gronde.
« Nous sommes fatigués des promesses. Ce que nous voulons, c’est la paix, la vraie, pour enfin retourner dans nos villages », confie un habitant déplacé, résidant dans un camp improvisé à la périphérie de Goma. Ces paroles résonnent comme un appel urgent à l’action, illustrant les attentes d’une population dévastée par les affrontements incessants.
Lors de cette mission d’itinérance qui doit également la conduire à Bunia, la Première ministre prévoit des consultations intensives avec les autorités locales, les acteurs de la société civile et les communautés affectées. Ce déplacement s’inscrit dans une volonté affichée de reconstruire une confiance mise à mal par des années de promesses non tenues et de mesures jugées inefficaces par de nombreux habitants.
L’état de siège, instauré pour contrer les groupes armés, n’a pas produit les résultats escomptés. La persistance de l’insécurité, exacerbée par la crise provoquée par les rebelles du M23, laisse les populations sceptiques quant à l’efficacité de cette stratégie. La question de son maintien ou de son assouplissement reste au cœur des débats, et Judith Suminwa devra trancher avec finesse face à des attentes souvent contradictoires.
En parallèle, des discussions sont prévues sur la gestion des Wazalendo, ces combattants locaux intégrés aux efforts militaires, mais dont le rôle soulève des interrogations sur leur impact à long terme sur la stabilité régionale. La coordination entre les forces armées et ces groupes est cruciale pour éviter des affrontements internes ou des abus susceptibles de fragiliser davantage une situation déjà précaire.
La prise en charge des déplacés reste une préoccupation majeure pour les autorités, les humanitaires et la société civile. Dans un contexte où les conditions de vie dans les camps sont jugées alarmantes, la question du retour des familles dans leurs localités d’origine se heurte aux réalités d’un territoire encore largement instable. « Sans sécurité, aucun retour ne sera possible. Nous avons besoin de garanties, pas seulement de discours », martèle un chef de village déplacé depuis plus d’un an.
Cette visite de Judith Suminwa est également une opportunité pour évaluer les initiatives locales de développement économique et social, souvent freinées par l’insécurité ambiante. Parmi les priorités figurent la réouverture des écoles, la relance des activités agricoles et le soutien aux petites entreprises, des mesures qui, bien qu’essentielles, peinent encore à se concrétiser sur le terrain.
Alors que la mission de la délégation gouvernementale se poursuit, un rapport détaillé est attendu pour dresser un tableau exhaustif de la situation. Ce document devra aller au-delà d’un simple constat pour proposer des solutions réalistes et adaptées aux besoins d’une région qui aspire à tourner la page de l’instabilité.
Au-delà des attentes exprimées par la population, cette visite est perçue comme un test pour la Première ministre. Sa capacité à traduire les doléances en actions concrètes sera déterminante, non seulement pour redonner espoir aux habitants du Nord-Kivu, mais aussi pour restaurer la crédibilité de l’exécutif face à une crise qui dure depuis bien trop longtemps.
M. KOSI