Le gouvernement congolais, par le biais du ministère de l’Entrepreneuriat, des Petites et Moyennes Entreprises, a récemment donné le coup d’envoi des activités du « Mois de l’Entrepreneuriat » à Kinshasa. Ce programme, fruit d’une analyse approfondie de l’écosystème entrepreneurial congolais, se focalise sur trois piliers essentiels : Capacité, Crédit, et Contrat.
Les Femmes Entrepreneures de Kinshasa : Un Parcours Semé d’Embûches
Que ce soit dans le secteur informel ou formel, les femmes engagées dans l’entrepreneuriat à Kinshasa sont confrontées à des préjugés sociaux. Elles portent souvent des responsabilités familiales considérables et leur niveau d’éducation demeure limité, comme le souligne Nadine Tshibola, à la tête de l’entreprise Mwasi ya Bwanya ya Congo, spécialisée dans la transformation alimentaire.
« L’économie congolaise est imprégnée par le secteur informel, où les femmes dominent. En tant qu’entrepreneures, nous bénéficions parfois du soutien technique des organismes compétents, avec des formations et des conseils sur la gestion de nos activités. Les institutions de microfinance viennent également nous solliciter de temps en temps pour des prêts. À Kinshasa, il est possible pour les femmes de faire des affaires, elles sont privilégiées et soutenues, mais cela n’est pas sans difficulté. Personnellement, j’œuvre dans la transformation, plus précisément dans la fabrication de pains. Cependant, en tant que femme, le principal obstacle auquel je fais face est de concilier ma vie de famille, mon entreprise, et mon travail. Toutes ces responsabilités m’empêchent de surveiller attentivement mon entreprise. La vie des femmes dans la société est loin d’être simple, nous devons faire face à des préjugés sociaux et assumer de lourdes responsabilités familiales, ce qui est loin d’être facile », confie-t-elle.
Israël Kanku, responsable de Glamour Mode, une entreprise spécialisée dans la vente de vêtements pour femmes, estime que les tracasseries administratives représentent un obstacle majeur pour le développement de l’entrepreneuriat féminin.
« Certes, le gouvernement congolais met en place des mesures pour améliorer le climat des affaires, mais au niveau des communes, la situation est loin d’être idéale. Dès que vous vous installez quelque part, les agents municipaux commencent à vous harceler en réclamant des taxes inexistantes. Finalement, si vous n’êtes pas résistant, vous risquez de mettre la clé sous la porte. Cela entrave sérieusement notre progression. Pour que les mesures du gouvernement nous bénéficient réellement, il est essentiel de sensibiliser et d’assurer un suivi sur le terrain pour leur mise en œuvre effective », déclare-t-il.
Pour Christine Belesi, de Miracle Clean Services, une entreprise spécialisée dans les services de nettoyage, les femmes ont besoin d’un encadrement adéquat pour prospérer.
« Les femmes sont tout à fait capables de faire des affaires, mais l’entrepreneuriat féminin peine à progresser. Souvent, les femmes se lancent dans l’entrepreneuriat par nécessité, pour subvenir à leurs besoins personnels. Elles doivent repenser leur modèle économique, envisager son expansion progressive. Pour y parvenir, elles ont besoin d’une éducation en matière d’affaires et de finance, cela les aidera à évoluer », soutient-elle.
Deux Profils d’Entrepreneures à Kinshasa
À Kinshasa, en République Démocratique du Congo, on peut distinguer deux catégories de femmes entrepreneures. Certaines créent des entreprises dans le but de les développer sur un marché prometteur, tandis que d’autres se lancent dans de petites activités par nécessité, cherchant à joindre les deux bouts. Ces dernières vendent des plats cuisinés, des produits manufacturés ou de grande consommation, ou exercent de petits commerces transfrontaliers.
Les femmes entrepreneures de la deuxième catégorie ont besoin d’une aide spécifique pour surmonter les obstacles liés aux taxes et aux impôts multiples qui pèsent sur leurs activités.
« Je tiens ce petit commerce pour subvenir aux besoins de ma famille, mais on nous impose de nombreuses taxes et impôts. Nous avons du mal à générer un revenu suffisant pour subvenir aux besoins de notre famille et développer notre entreprise », déplore Thérèse Kole, vendeuse d’épices au rond-point Ngaba. « De plus, la police nous chasse constamment pour dégager la voie, même lorsque le marché est bondé. Comment pouvons-nous vendre dans de telles conditions ? Ces mêmes policiers nous réclament 500 à 1000 FC pour nous laisser travailler. Nous ne pouvons plus gagner notre vie ni subvenir aux besoins de nos familles. Nous demandons au gouvernement de réviser ce système pour nous permettre de survivre », ajoute Mamy Ghenda, vendeuse de légumes.
Un Mois de l’Entrepreneuriat Riche en Initiatives
Au cours de ce mois de l’Entrepreneuriat, le ministère de l’Entrepreneuriat, des Petites et Moyennes Entreprises prévoit un éventail d’activités, notamment :
- Un déjeuner de travail avec les partenaires au développement.
- Une grand-messe de l’entrepreneuriat axée sur le projet « 1 million de PME pour huit millions d’emplois ».
- La troisième édition du « Challenge Entreprise » pour récompenser les PME qui se sont distinguées en 2022.
- L’ouverture de la « Maison de l’Entrepreneuriat ».
- Les États Généraux de l’Entrepreneuriat Congolais.
- La rencontre du Président de la République avec un échantillon de jeunes entrepreneurs à l’échelle nationale.
Ces activités visent à éclaircir les différentes mesures d’accompagnement mises en place par le cadre légal et institutionnel, à mettre en valeur et capitaliser les initiatives complémentaires du secteur privé, et à
créer un espace de dialogue avec les partenaires au développement.
Le « Mois de l’Entrepreneuriat » offre ainsi une opportunité précieuse pour aborder les défis auxquels sont confrontées les femmes entrepreneures de Kinshasa et réfléchir à des solutions concrètes pour soutenir leur réussite dans un environnement complexe.
Manassé Kitemoko Kosi, Journaliste Bisonews.cd